“Sunt lacrima rerum”- que l’on pourrait traduire par “Il y a des larmes au fond des choses”, est la formule devenue célèbre que Virgile prête à Énée dans l'Énéide, quand ce dernier reste pétrifié devant une fresque représentant la guerre de Troie.
Comme Énée, je pleure à chaudes larmes, quand je suis affectée directement par les choses du monde. Si le monde me blesse, ou s’il m’émeut, mes larmes coulent : larmes de tristesse, larmes de colère, ou larmes de joie, elles surviennent quand les choses du monde sont suffisamment proches pour m’affecter.
Aristote remarquait en effet que lorsqu’un objet s’éloigne, il ne nous fait plus peur. Telle pourrait être la leçon de mes larmes : plus je m’engage dans les relations du monde, plus je cours le risque d’être ému, et de pleurer.
Qu’est-ce qui est donc proche? Ce qui me touche, au point de verser une larme. Accueillir celle-ci, c’est prendre acte de la proximité de la chose, et découvrir la valeur que je lui porte au regard de mon monde, c'est explorer le besoin non satisfait qui a déclenché la charge émotionnelle.
Le plus souvent, c’est ce vers quoi je me dirige qui m‘affecte. Mon projet de vie est ainsi rempli de la possibilité de me laisser émouvoir. Le bonheur que je cherche implique des manières de me sentir, y compris des larmes, qui sont l’occasion de m’orienter vers un meilleur accomplissement.
C’est à ce prix en effet que je peux saisir l’énergie vitale en moi, quand l’émotion - comme son étymologie l’indique - me met en mouvement. Mes sentiments deviennent ma manière personnelle de dire ma relation au monde, en étant affectée justement par les choses.
Et si je connais précisément mon intention vis-à-vis des choses du monde, autrement dit, ce que je veux, mes affects seront liés à une visée. Ils seront comme dirigés vers mon objectif, et je pourrai les décrypter comme de véritables vecteurs de projets.
Il y a donc bien des larmes au fond des choses et ce ne sont pas des larmes de crocodile !
Parlons-en.

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